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Merci aux poètes et poétesses d’avoir accepté de partager quelques uns de leurs écrits sur cette page.

Silhouette

Ombre énigmatique et fugace,
Évanescente à douter d’être,
De son passage nulle trace,
Oubliée jusqu’à disparaître.
 
Interdit de sourire au monde,
D’en respirer les douces ondes.
 
Effacée, emmurée vivante,
Cernée, dans son tissu enclose,
Incarcérée, inexistante,
Son gardien veille et s’interpose
 
Entre elle et la vie qui s’élance.
Entravée, niée, opprimée
Par le carcan de l’ignorance,
Autant dès lors la supprimer.
 
Interdit de laisser entendre
Sa frêle voix pour se défendre.
 
Assassinée à petit feu,
Étouffée dans sa camisole,
Par un homme au regard sérieux
Qui sur elle a pris tout contrôle.
 
Interdit d’offrir son visage,
A qui pourrait lire un message.
 
Privée du vent qui déraisonne,
Des livres ouverts sur le monde,
De la fière joie qui claironne,
Et de la liberté féconde…
 
Interdit le chant de son âme,
Interdit de dire son drame.
 
Elle ne laisse aucune empreinte,
Discrète errante dans la nuit,
Nul ne relâche son étreinte
Sur cette femme anéantie.
 
Qui saura lui réinventer
L’itinéraire de lumière
Qui lui rendra sa dignité,
La conduira vers d’autres sphères ?
 
Interdite la poésie,
Qui distille ses hérésies.


Poème de Esterina
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Féerie

Il y eut un été aux grappes nonpareilles 

Un silence y régnait dont le siècle mourut

Tout le long du sentier peu à peu avait crû

un parfum évoquant d’impensables merveilles

Une brise baignait l’azur baisait la terre

Les ombres uniment luisaient d’un bleu ardent

jusqu’ à ce que midi trônât Lors quel chiendent

quel chardon n’émettait un rayon de mystère 

Au zénith par instants vibraient des ailes blanches

d’oiseau sans doute bien Ou d’ange On ne le sut

jamais en vérité Mais l’éclair aperçu 

révélait un bonheur aux millions de dimanches

Des taches d’or brûlant et de rouges zébrures 

fleurissaient l’herbe avec pour couronner l’éclat 

la danse d’une abeille Exultait çà et là 

quelque cigale au fond d’un monceau de diaprures

De poussière il n’était qu’une poudre dorée

quand l’air parfois nimbait dans les feuilles les nids

Vacances de juillet Poèmes infinis

Et soudain sous le ciel s’avança l’Adorée


Poème de M. de Saint-Michel
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Première fois

Première fois comme un dernier instant
Où le printemps n’aurait plus rien à dire.
Première fois où je vis ton sourire
Comme une fleur, avouer, je t’aime tant.

Premier baiser où s’abrite le vent
De nos désirs ; rien n’ose contredire
Le doux élan que nous allons écrire
Sur notre page et rien auparavant.

Rose trémière et sans doute première,
Viens éclairer mon ciel de ta lumière !
Ne me dis pas, je n’aurai pas le temps

De vous ouvrir la route buissonnière
Où l’éternel amour est légendaire.
Dernière fois comme au premier moment.


Poème de Emrys
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Vertige, que suis-je ?

Déposée par hasard sur ce vaisseau prodige,
Qui tournoie, aspiré dans sa valse infinie,
Une vie égarée est prise de vertige,
Un rien, un ignorant qui tremble et qu’on oublie.
 
Humilié au milieu d’insondables espaces
Il questionne le ciel et ses lueurs lointaines :
Un fragment de pensée qu’un brin de temps efface,
Microbe de poussière à la flamme incertaine.
 
Quel sens pour tout ce bruit, ces rêves fracassés ?
Ces perles de beauté, insolubles cristaux
Qui parsèment d’éclats ce monde terrassé ?
Comment réassembler ces multiples morceaux ?
 
Réparer patiemment ce désastre absolu,
Recréer le chemin d’un eden corrompu
Et guérir l’amnésie de son esprit reclus ?


Poème de Esterina
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Les Bocages disparus

A l’abri des bocages disparus,
dans les odeurs incongrues de charmille et de fleurs,
de foin, de pain d’épices,
nous marchons à l’échappée,
en contretemps,
entre avenir et mémoire.

Chaque pousse plantée au pied de chaque stèle
s’enivre de lumière, s’enorgueillit déjà
d’une suave beauté dans le petit matin
malgré l’air froid et sec.

Elles ignorent tout de nous, comme les oiseaux là-bas
indifférents qui s’égosillent,
saluent un nouveau jour,
savourent la terre meuble, l’humidité du bois.

Carnac amer, ombre de juin.
Dans le silence nous quitterons
ces lieux qui nous observent,
peut-être
et figent notre souffle.

Eux ne s’en iront pas.

Nous garderons entre nos doigts glacés cette absence visqueuse
d’avoir un jour souri, d’avoir aimé la vie,
et sur nos lèvres le goût des roses.


Poème de Anwen
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