Jour de neige

– À ma fille –

Aube nouvelle, blanche clarté,

Manteau de splendeur et de calme ;

Un enfant pressé de marcher

Furtivement pose le pied

Sur cette neige douce et froide

Ses empreintes de pas laissées

Sur le tapis immaculé

Qui croustille sous ses semelles,

Le voici donc, trotti-trottant

Dans l’épaisse couche moelleuse,

Traînant les pieds dans la poudreuse,

Heureux des sensations nouvelles

Qu’il découvre, le cœur allègre,

Façonnant des boules de neige

Entre ses gants floqués de blanc

Un enfant à soi

– À C. –

Des enfants chantant à tue-tête

D’autres jouant ici et là ;

Tout est espoir pour ceux qui peinent

À recevoir la vie en soi

Un enfant où l’on se projette,

Pour qui l’on chantonne à mi-voix,

À qui tendrement l’on s’adresse ;

Un bébé que l’on couve en soi

Des enfants criants, espiègles,

Courant essoufflés à deux pas ;

Tout est douleur pour ceux qui perdent

Ce fruit qui grandissait en soi

Des enfants qui rient aux éclats

Et tout en chahutant t’escortent ;

Tout est souffrance à ceux qui portent

Ce vide immense au fond de soi

Un enfant venant sur la Terre

Et s’incarnant pour quelques mois,

Guidant l’amour de l’univers ;

L’éternité lui tend les bras

Tu n’as pas pu voir le soleil

– Aux bébés partis trop vite –

Tu n’as pas pu voir le soleil

Ni les brumes tombées du ciel,

Petit être prêt à quitter

Le ventre accueillant de ta mère

Tu n’as pas pu voir les étoiles

Qui scintillent au firmament,

Les arcs-en-ciel après l’orage,

Les yeux aimants de tes parents

Tu n’as pas pu voir la lumière,

La nuit est tombée juste avant,

Ton existence fut si brève

Qu’elle a laissé nos cœurs béants

Mais tu fais partie des nuages,

Des brumes et du firmament,

Des arcs-en-ciel après l’orage

Du cœur aimant de tes parents

Tu referas ce grand voyage

Rosée brillante du levant

Pour danser parmi les étoiles,

Poussière d’or dans le couchant