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Merci aux poètes et poétesses d’avoir accepté de partager quelques uns de leurs écrits sur cette page.

Dernières lueurs

(gérardine)


L’horizon nuancé s’enveloppe dans l’ombre ;

Le zéphyr est tombé, dans la fraîcheur du soir,

Et l’on devine à peine, au creux de la pénombre,

Les contours recouverts d’un léger velours noir.

Après tant de soleil, voilà que le jour sombre !

Déjà l’on ne voit plus, du lac, le doux miroir.

Alors que le jour meurt et le couchant s’avance,

Dans un dernier sursaut, empreint de désespoir,

Le crépuscule joue et danse en transparence.

Un solitaire instant, bleuté, diaphane et pur,

L’angélus retentit, seule humaine présence,

Languissamment porté tandis que meurt l’azur.

L’écharpe de vapeur caresse le jour sombre ;

La palette du soir s’est perdue dans l’obscur…

L’horizon tout entier s’est enveloppé d’ombre.


Poème de Cyraknow
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Combien faut-il de mots

Combien faut-il de mots pour conter une vie ?

Aurait-on seulement assez du dictionnaire,

Ou faut-il inventer et créer à l’envi,

Dans la forge des sons, des noms imaginaires,

Des verbes flamboyants pour dire les romances,

Des pronoms infinis qui sonneraient l’écho

Du tourbillon des peurs, des joies, de l’espérance,

Et qui feraient tomber les murs grammaticaux ?

Faut-il abandonner les règles édictées ?

Pourquoi donc s’enfermer dans ces lois ridicules

Qui freinent notre ardeur et notre liberté ?

Face à l’amour qu’on crie, qu’est-ce qu’une virgule ?

***

Il faut bien peu de mots, pourvu qu’on les choisisse

Avec habileté et dans le soin constant

Du respect harmonieux du subtil édifice

De la langue sculptée par les plumes d’antan.

Il n’est de liberté que face à la contrainte.

Si la règle est ardue, plus nous la connaissons,

Plus nous saurons œuvrer pour que sa rude étreinte

Débloque dans nos cœurs la musique des sons.

Car, ne t’y trompes pas, pour conter une vie,

Il faut juste en saisir la mélodie profonde

(Elle entraîne le cœur, à son rythme asservi),

Puis en restituer l’harmonie vagabonde.

Si tu l’as bien compris, alors en quelques lignes

Couchées sur le papier, tu nous inviteras

Aux délices du vin fait des plus belles vignes

Et l’ivresse de tes mots nous enchantera.


Poème de Mr Strangeweather
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L’or du temps-

Douce lumière de la rose

phare à guider nos jours, nos nuits,

si prompte à la métamorphose,

précieuse, comme ce qui fuit,

le jardin, grâce à vous, s’éclaire

d’une lueur inaperçue

de ceux qui ne savent que faire

de la beauté de ce qui fut,

sur le fleuve du temps la rose,

navigue plus vite que nous,

la mort, elle en sait quelque chose,

qui sa chevelure dénoue,

mais le temps qu’encore elle brille

pour le poète est un éclat

qu’au profond de l’âme il distille

qu’au profond du cœur il reçoit,

je voudrais tout recommencer

et repartir vers la jeunesse,

exercer un autre métier,

voyager, voyager sans cesse,

les chemins qui étaient ouverts

se sont fermés depuis longtemps,

il me reste un bord de rivière,

le soleil, comme un diamant.

Ne pas tout à fait s’en aller,

avant de dire la beauté

des arbres et du soir qui tombe,

quand la lumière combat l’ombre,

oh ! ne pas mourir encore,

avant que d’avoir transmuté

l’or du temps, donné aux roses

le diadème de l’été.


Poème de michelconrad
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Lettre de mer

C’était un jour de grand rhum,
c’était un soir perdu,
sous les palétuviers roses,
je m’enlarmais de toi. …
Le ciel des Grenadines a de ces grands mauves
qui virent à l’absinthe quand l’aurore les effleure :
la nuit, là-bas, n’est qu’une affaire d’arômes.

Essaierais-tu sur ton corps
le reflet des volubilis,
leur soie bleu-fragile et diaphanement belle dans la gloire du matin,
et ce velours parfum de mandarine amère,
lentement vanillé, poudré,
avec ce qu’il faut d’imprévisible ?

Ici les zéphires verrouillent nos esprits aux étoiles.
La pluie sur l’orchidée chasse un peu de notre ombre.
Les soupirs des sargasses invitent à la folie.
J’estompe mes mois de Baille aux couleurs criardes des madras,
aux alcools d’or et d’ambre, satinés, doux, comme tes lèvres.

Laisserais-tu mes mains couturées d’errance ceindre ton front
de fleurs d’agave, glisser dans tes cheveux
l’indicible de souvenirs carminés
au hasard des escales – opium ?

Calendage de ma peau gommée par les heures de quart :
je l’abandonne aux déferlantes en espérant ton souffle,
ultime chatoyance d’un grand astre en sursis

Rien de grandiose comme l’ouragan ;
c’est un peu de ta voix mélangée à l’abîme et revêtue de houle.

Demain nous appareillons, puissent ces mots te trouver sereine


Poème de Anwen
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Prière pour une humanité malade

Écrasés de milliards de valses éternelles,

Fétus de vie perdus dans l’infini fourbu,

Pourquoi faut-il alors que nos soifs d’absolu

Nous entraînent à former tant de folies mortelles ?

A feu à sang

Des portions de nos terres

A genoux exsangues

Des milliers de nos frères

Quel ouragan furieux vient encore étourdir

Nos âmes égarées et par quelle fêlure ?

Que nous éloigne alors de l’harmonieux désir

D’une existence heureuse au cœur de la nature ?

La rivière se fraie un chemin de lumière

Par les monts par les plaines en toutes latitudes

A travers les forêts au-delà des déserts

Que chaque paysage ait sa béatitude

Sur cette terre élue, miracle maltraité.

Terre martyre aux mains de tes humains bourreaux,

Pilonnée, déchirée, étouffée, assoiffée,

Que le temps te libère et brise tes barreaux.

L’étoile fixe luit au cœur de nos nuits noires

Le croissant lui sourit éclairant nos mémoires

La croix comme horizon aux lois que l’on veut croire.

Je prie moi qui ne crois qu’aux aspirations claires

Que la force de vie fuse comme un geyser

Telle une douce rose exhalant le parfum

Des beautés recelées en ce monde importun.


Poème de Esterina
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