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Merci aux poètes et poétesses d’avoir accepté de partager quelques uns de leurs écrits sur cette page.

J’avais une étoile

J’avais une étoile

Au bout des doigts

Comme d’autres ont

Un mot au bout de la langue

J’écoutais le vent

Qui faisait hurler

Les fantômes

Et chanter les arbres

Pourtant

J’étais moins que rien

Une ombre parmi les ombres

De la nuit et je fuyais

Je fuyais mon destin

Je tenais le ciel étoilé

Dans ma main

Et l’Univers me paraissait

Si fragile

Aussi fragile que ses lumières

Qui se brisaient innocemment

Sur mon cœur et mon cœur

N’en savait rien



Poème de Julien Hoquet

Frimas 

Minuit s’est abattu sur l’écorce des cœurs
Est-ce l’hiver dis-moi toi que l’âge flagelle
Il n’est ici question de bonheurs de malheurs
mais de la ténèbre éternelle

Se perdent les chemins fantômes dans le deuil
On y entend parfois hurler la lune noire
et ses chiens aboyer La plaine n’a de seuil
qu’un lit où s’endort la mémoire

Et quel froid dans les os Le grand froid de l’oubli
Le jour a disparu avec le dernier songe
Bientôt il neigera Le corps enseveli
s’émiettera puante éponge

Cauchemar Cependant les dents claquent soudain
après qu’ont chaviré dans le Styx les étoiles
Bien mortes sont les fleurs de l’antique jardin
Oui quelle glace dans les moelles

Voici l’absence même où l’ombre se dissout
où la voix grelottante épouse le silence
et s’enfonce aux enfers que nul amour n’absout
Est-il dis-moi une espérance


Poème de M. de Saint-Michel
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Ne demande pas ton chemin …

je me suis perdu
dans les bois de mon enfance,
hors des sentiers battus,
parmi les arbres
             et les broussailles,
en quête de glands,
            de châtaignes,
                          et d’aventure

                       je me suis perdu
dans les impétueux courants
et les tourbillons du gave,
qui m’emportaient vers l’aval
                             et l’inconnu,
ou à travers ses bras morts
aux eaux sombres et malsaines,
         et plus glacées encore

                 je me suis perdu
sur les fleuves de Guyane,
jusqu’au Haut Maroni
et aux rapides de l’Itany,
parmi les dernières tribus
des Indiens Oyana Oyana,
couchant dans leur hamac,
partageant leur kasave
à la sauce de poissons
qui ont macéré au soleil

                 je me suis perdu
parmi les coraux colorés
et les prairies sous-marines
de la côte sous le vent,
à la Guadeloupe,
là où les barracudas pensifs
vous épient, en cercle,
tout au long de vos plongées

                   je me suis perdu
un jour, dans la mer caraïbe,
échoué sur l’île aux oiseaux*,
dormant dans leur fiente
qui recouvrait tout le sable
d’une couche épaisse, fade,
dans le bruit de leurs ailes,
           enveloppé de leur cri

                   je me suis perdu
dans les sables du Sahel,
où les pistes,  ne mènent
nulle part, sauf, parfois,
à quelque ville fantôme,
au bord d’un fleuve à sec

                   je me suis perdu
dans les rizières du Viet Nam,
sur les diguettes,

d’un village entouré de bambous
         à un autre, semblable,
ou d’une pagode à une autre,
toutes muettes et silencieuses

                je me suis perdu
dans les ciels immenses
d’une île perdue sous l’équateur**
naviguant, des nuits entières,
de la Grande Ourse
                     à l’Etoile du Sud


je me suis perdu avec  passion,
je me suis perdu avec bonheur,
je me suis perdu avec désespoir,


je me suis perdu …

          je me suis perdu …

                  je me suis perdu

                         je me suis perdu …

                . . . . . . . .


mais pourquoi as-tu couru ainsi,
sans rime ni raison, sans fin,

dans toutes ces contrées
          et sur tous ces chemins,


pourquoi as-tu erré
            jusqu’à te perdre
                 à travers le monde,

              pourquoi, le sais-tu?


peut-être justement, simplement,

                               pour te perdre … .



* La Isla de Aves
** São Tomé


. « Ne demande jamais ton chemin à celui qui le connaît, tu risquerais de ne pas t’égarer »: phrase de Rabbi Nahman de Bratslav, citée par le peintre Garouste.



Poème de Jped
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Je voudrais être un arbre

Je voudrais être

Un arbre

Pour ouvrir

Mes bras

Aux oiseaux

Et embrasser

La terre

De mes racines

Je voudrais être

Un arbre

Et à l’hiver

Encoller la neige

À mes branches

Et à l’été

Boire la pluie

Silencieusement

Je voudrais être

Un arbre

Au printemps

Et laisser naître mes bourgeons

Ou à l’automne

Briller

De toutes mes couleurs

Je voudrais être

Un arbre

Et imaginer

Des forêts

Partout sur la terre

Je voudrais être

Un arbre

Et devenir

Du papier ou une chaise

Ou une maison

Je voudrais être

Un arbre

Et mourir

Dans le feu

Pour te réchauffer

Mon amour


Poème de Julien Hoquet
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