Le jour de la Saint Juste

Le jour de la Saint Juste,

Sur l’autel des prières,

J’ai allumé un cierge

Pour votre beau pays


Après toutes vos peines,

Grâce à cette neuvaine,

Viendra bientôt j’espère

La paix en Arménie.


Le jour de la Saint Juste,

Sur l’autel des prières,

J’ai allumé un cierge

Pour votre cher pays


Afin que la lumière

De notre humanité,

Qui brille pour les Justes

Œuvrant sur cette Terre,


Garde en son feu sacré

Nos sœurs et nos frères

D’Artsakh et d’Arménie,

Et préserve leur vie.

A vous

Vous qui avez porté neuf lunes cet enfant,
Vous qui avez peut-être souffert en accouchant
D’un superbe bébé qui faisait la fierté
De sa grande lignée, éprouvée si souvent
 
Vous qui avez nourri de votre lait l’enfant,
Vous qui l’avez veillé chaque nuit patiemment,
Vous qui l’avez bercé dans vos bras doucement,
Charmée par les sourires de ses yeux innocents
 
Vous qui l’avez guidé lors de ses premiers pas
Vous qui avez compris ses « comment », ses « pourquoi »,
Vous qui avez perçu ses tout premiers émois
Et l’avez régalé de vos bons petits plats
 
Vous qui avez œuvré à son éducation,
Vous qui avez suivi sa belle évolution,
Vous qui l’avez toujours soutenu ardemment,
Et lui avez transmis ce qui comptait vraiment
 
Vous qui avez frémi en voyant que la guerre
Surgissait aux frontières de votre cher pays,
Et l’avez vu grandir pour devenir cet être
Capable de choisir en son âme et conscience
Et d’assumer les choix qu’il a faits pour sa vie
 
Vous qui, dans cette crainte à l’estime mêlée
Devant ce jeune adulte qui ne se soumet pas,
Avez pu l’embrasser une dernière fois
Juste avant qu’il ne quitte les lieux de son enfance,
Engagé volontaire pour garder sa patrie,
Qu’il vienne d’Arménie ou de sa diaspora
 
À vous qui restez-là avec les yeux ouverts
Et le cœur en suspend, de jour comme de nuit,
À vous qui apprendrez peut-être la nouvelle
Qu’il est mort sur le front et ne reviendra pas ;
 
J’aimerais tellement vous serrer dans mes bras,
Vous réchauffer le cœur, pour épancher vos larmes…
Je voudrais vous écrire que l’on n’oubliera pas
Les garçons et les filles qui sont tombés là-bas,
Repoussant l’agresseur autant qu’il est possible
Avec leur âme fière, avec leur âme digne,
Avec leur enthousiasme, leur courage et leur foi !
 
Mais qu’il est difficile de regarder la liste
De ces noms qui s’alignent comme autant de cercueils,
Ces noms de jeunes gens, ces noms de jeunes filles,
Ces hommes et ces femmes qui ont donné leur vie
Pour servir leur nation avec gloire et honneur ;
Protégeant sans faillir la civilisation
Qui fit d’eux ce qu’ils sont, et que nous partageons,
 
Nous qui sommes ici, avec pour seules armes
Nos marches, nos discours, nos drapeaux, nos alarmes,
Nous qui sommes unis par les mêmes valeurs…
Qu’attendons-nous enfin pour agir bel et bien ?
Que dira-t-on demain pour justifier nos actes
Si l’on ne soutient pas nos frères de l’Artsakh ?

Artsakh

Beaucoup n’ont pas vingt ans, mais ils partent pourtant
Défendre les frontières de leur chère patrie.
Ils savent, c’est certain, quel en sera le prix,
Car ils ont pour tout choix ; gagner ou disparaître.
 
Peuple martyrisé qui pleure ses enfants,
Lui qui en a tant vu depuis des millénaires ;
Purgé de ses savants, ses intellectuels,
Peintres et écrivains, musiciens et poètes,
Prêtres et militaires, ou simples paysans,
Durant ce génocide encore si présent…
 
Historique berceau de notre chrétienté
Luttant pour protéger sa civilisation,
Sœur aînée de la France aux héros inspirants ;
La lointaine Arménie, amputée de ses terres,
Garde pieusement l’âme de ses ancêtres
Et la foi immuable en leur enseignement.
 
Mais tandis qu’elle aspire à vivre dans la paix,
Elle ne laissera pas piétiner ses frontières,
Elle ne permettra pas que l’on souille ses terres,
Elle n’acceptera pas que l’on vienne en vainqueur
Bafouer ses valeurs sans les défendre aussi ;
 
Et pendant que le monde observe et négocie,
Soucieux de ménager ses intérêts futurs,
Ces jeunes qui avaient l’avenir devant eux,
Jeunes gens, jeunes filles, fiers et courageux,
Venus pour protéger de leurs mains leur pays,
 
Ces hommes et ces femmes sacrifient leur futur
Et, de toute la force que donne leur esprit,
Font face à l’ennemi et luttent sans répit
Afin de préserver notre riche culture.



* Haut-Karabakh

Au chauffeur de la ligne 7

Au chauffeur de la ligne 7,

Ce vendredi vingt et un août,

Qui rendit plaisant le voyage

Par son humour et son bagout ;

À l’homme aux intentions louables,

Attentionné et charitable,

Prônant la solidarité,

L’entraide entre les voyageurs,

Par une attention plus marquée

Envers ses voisins d’à côté,

En professionnel avisé,

Dans une engageante gageure ;

Si soucieux de son prochain,

Sympathique dans ses propos,

Un mot aimable pour chacun ;

En quelques stations de métro,

Rendant leur sourire aux visages,

Donnant de l’âme à ce trajet,

Il détendit toute une rame

De passagers désabusés

Par l’affligeante indifférence

Que l’on rencontre désormais

Dans nos quotidiens gangrenés

D’une sournoise délinquance ;

Recevant par son bon esprit

Une moisson de sympathie,

Des sourires en avalanche,

De jolis bouquets de « mercis » 

Et l’immense reconnaissance

D’êtres profondément touchés

Par l’étonnante prévenance

Que cet homme leur témoignait.

Nous n’emporterons rien

– À Monsieur Hovhannès Haroutiounian dont les profondes réflexions m’ont inspiré ce poème –

Pour cette traversée, nous n’emporterons rien

De ce que l’on aimait, il faudra tout laisser ;

Les lettres, les photos, les livres, les tableaux,

Les êtres qui nous touchent, qui nous ont fait vibrer

Les proches, les amis, qui nous ont entourés,

Les maîtres, les poètes qui nous ont enseignés,

Les enfants que l’on a si fièrement portés,

Aimés sans condition, patiemment élevés ;

Nous n’emporterons rien de ce que l’on aimait.

Nous n’emporterons rien de ce que l’on aimait ;

Les astres de la nuit et des belles journées,

Les parfums enivrants, les fruits mûrs de l’été,

Les animaux, les fleurs, les oiseaux, les poissons,

La chanson de la vie, la danse des saisons

Les chères mélodies qui jadis nous berçaient,

La musique des siècles dans nos âmes restée,

Le ciel et les nuages changeant à chaque instant,

Qui font que l’on se sent si pleinement vivant ;

Nous n’emporterons rien de ce que l’on aimait,

Il faudra tout laisser.

Nous n’emporterons rien de ce que l’on aimait,

Mais restera de nous, après notre passage,

Ce que l’on a transmis, l’amour qu’on a donné,

Des fleurs de souvenirs, des bouquets d’amitié,

La foi en l’avenir et dans la destinée ;

Nos cœurs que l’on partage jusqu’à l’éternité,

Impalpable héritage que je voudrais léguer.