Un tout petit Rouge-gorge

– À Thierry L.-C. –


Un tout petit Rouge-gorge

S’est posé près de ma porte

Pour picorer des grains d’orge

Loin du couvert des sous-bois

Un tout petit Rouge-gorge,

Joues rougies par l’hiver froid,

S’est blotti tout près de moi

Pour chanter ses jolies notes

Ce tout petit Rouge-gorge,

Pour vous fêter dignement,

En messager du printemps

Joyeusement vous apporte

L’éclat des mots florissants,

Inspirants, qui nous emportent

Dans les bouquets odorants

Des muguets rouges* et blancs.



* de Christian Bobin : Le muguet rouge

Gent ailée des balcons

Le soleil s’est levé au-dessus de la ville

Brasier incandescent sur les toits blancs de givre

La jardinière d’eau réservée aux oiseaux

S’est changée dans la nuit en un bloc de granit

Le beurre éparpillé en tout petits morceaux

N’est pas resté longtemps sur les herbes gelées,

Les trois pies à l’affût ne s’y sont pas trompées,

Les picorant du bec avec avidité

Puis sont venues, discrètes, les belles à collier

Fidèles tourterelles, robe beige rosé,

Délicatesse même et douceur incarnée,

Craintives à l’excès mais assez affamées

Pour venir explorer les recoins oubliés,
Osant pour l’occasion tenir tête aux pigeons

Pour sauver quelques graines de tournesol doré

De leur gloutonnerie à peine rassasiée.

Petites bêtes des jardins

– À ma fille –

Dans l’aube renaissante, quand l’air est respirable,

La famille Rouge-queue au pit pit assidu

S’envole et disparaît dans le buisson touffu ;

Les petites mésanges qui jouent dans le mûrier,

S’agrippant au vieux mur piquent avec succès

Tout insecte imprudent passant un peu trop près

Un lézard des murailles, l’œil toujours aux aguets,

Se gorgeant de soleil sur le brûlant muret,

File sans hésiter au premier bruit suspect

Dans quelque infime faille, esquivant le danger

La tonnelle de vignes aux grappes opulentes ;

Le vol lourd des frelons dans l’été surchauffé ;

Le figuier plein de fruits à la chair parfumée,

Vert tendre ou lie-de-vin, régal à déguster,

Détachés sans effort en laissant sur les branches

Quelques lambeaux sucrés, des guêpes convoités

Les quilles finlandaises, vissées dans les graviers,

Sous l’ombre bienfaisante du tilleul argenté

Dont les feuilles cordées abritent, familiers,

Des milliers de gendarmes aux masques contrastés

C’est le temps des vacances, lentement savouré,

Moment tant espéré où l’on peut musarder

Et s’allonger dans l’herbe pour simplement rêver.