Lucioles

– À L. et C. –


Longue marche silencieuse
Dans la nuit noire d’ivoire,
Jusqu’à l’avènement rare
D’un inoubliable soir
 
Dévoilant par le langage
Codé d’une mouche à feu,
La féerie lumineuse
De ses signaux amoureux ;
 
Flammèches luminescentes,
Brillant par intermittence,
Qui scintillent dans les airs
Jusqu’au mystérieux repaire
 
Où les lumières s’affolent
Dans un ballet d’étincelles,
Petites fées sylvicoles
Dont la beauté se révèle ;
 
Girandoles de lucioles
Qui allument leur fanal
Et clignotent dans le soir
De leur envolée nuptiale,
 
Semant des paillettes d’or
Au fond de vos yeux ravis
Pour laisser dans vos mémoires 
L’enchantement d’une nuit.

L’orage se prépare

Chaleur moite qui stagne dans l’air humide et lourd,
Sous l’aérienne chape aux cotonneux contours
L’orage se prépare ; tableau éblouissant
D’une intense lumière saturant les pigments.
 
Les cumulonimbus se chargent tant et plus
De gouttes en suspend attendant le signal,
Un éclair aveuglant zèbre le paysage ;
Puis le tonnerre éclate et crève les nuages.
 
Dans un fracas violent l’eau de pluie se répand ;
Trombes d’eau qui s’abattent en déluge céleste
Et la terre assoiffée accueille ce présent
Qui ruisselle de vie et chante d’allégresse.

En friche

Il y avait un îlot
De nature préservée,
Tout près du périphérique,
Où poussaient en liberté
Les chardons, les achillées,
Les orties, les marguerites
 
Une île encore sauvage
Aux plantes des plus rustiques
Qui grimpaient sur le grillage,
Non loin des murs bétonnés
Des immeubles du quartier ;
 
La bryone, la bardane,
La clématite des haies,
Liserons et graminées,
Croissaient et multipliaient
En toute simplicité.
 
Il y avait un terrain,
Une oasis de verdure
Concentrée en un refuge
D’espèces enchevêtrées,
Où fleurissaient sans compter
 
La porcelle et le plantain,
Le cirse et la douce amère
La vesce et le fumeterre,
La molène aux hampes d’or,
Le lierre et que sais-je encor
 
Chélidoines, vergerettes
Trèfle, colza, pissenlits,
Laiterons, ronce et rumex,
Coquelicots et silènes
Qui vivaient en harmonie.
 
Ce matin mon cœur se serre
Devant le triste spectacle
De ce petit bout de terre
Où musardait mon regard,
Fauché sans aucun égard.
 
Dans un halo de poussière
Il s’est volatilisé ;
Ne reste que l’herbe rase
Et l’odeur de foin coupé
Qui flotte sur la chaussée.