C’est l’hiver mon amour
Et la neige en paillettes
A recouvert la terre
De sa douce lumière,
De son brillant velours.
Le ciel n’est plus morose,
Il y a dans la danse
De ces petits flocons
Une sorte de joie
Contenue, maladroite,
Légère et tournoyante.
Dans la pâleur du jour
Ces cristaux doux et froids,
Moelleux pompons d’ouate
Sortis de l’oreiller
Rebondi des nuages,
Se trouvent éparpillés
Et jouent, irréguliers,
Sur le gris des façades.
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Vanina
À quoi penses-tu Vanina,
Quand tu sens leur corps se presser,
Quand tu sens leur chair se figer
Sans que tu puisses dire ou faire
Quoi que ce soit pour l’empêcher ?!
À quoi penses-tu Vanina,
Lorsque t’atteignent les secousses
Spasmodiques de leur désir
Et qu’il n’est pas question de mousse
De fleurettes ni de plaisir ?!
À quoi penses-tu Vanina,
Quand ton regard se fait plus sombre,
Lorsque tes joues dans la pénombre
S’empourprent violemment de honte
Et qu’à tout rompre ton cœur bat ?!
Je pense à toi et je me dis
Qu’il est des hommes si gentils,
Pleins de douceur et de respect,
Prêts à aimer avec tendresse
L’échange autant que la caresse,
Et qui refermeront les plaies
Que d’autres hommes auront ouvertes.
Colombine et Pierrot
Pierrot a dit à Colombine, cette nuit-là,
Qu’il se trouvait bien dans ses bras
Et elle a écouté docile, presque sans voix,
Le chant de son cœur en émoi.
Pierrot a conduit Colombine, cette nuit-là,
Sur les bords de la mer de Chine, entre ses bras,
Elle s’est enivrée de caresses inconnues,
Du frisson de ses doigts tout contre sa peau nue.
Colombine a cherché Pierrot, les jours suivants,
La lune n’était plus complice comme avant…
Elle a appris l’absence, elle a connu le froid,
En cherchant Pierrot sur les toits.
Pierrot a revu Colombine, un peu plus tard,
Il n’y avait ni mandoline ni guitare,
Il y avait le temps qui sépare et unit,
Et change simplement les amants en amis.
Le clown triste
Il entre dans l’arène
Et la foule applaudit,
Son sourire élargi
S’ouvre jusqu’aux oreilles,
Un sourire rouge et blanc
Qui recouvre ses rides ;
Il a l’air d’un enfant
Vieux prématurément.
Et les gamins se lèvent
Et ils crient de plaisir
Pour les tartes à la crème
Les soufflets, les jets d’eau…
Sous son masque de peau
Garde-t-il en mémoire
Ces farces dérisoires
Et ces gags un peu gros ?
Voilà qu’il se demande
Ce qu’il fait dans ce cirque ;
Sa vie c’était ce chapiteau,
Son gagne-pain, ce numéro,
Et ces enfants dans les gradins
N’étaient-ils pas un peu les siens ?
Voilà qu’il leur tourne le dos
Et disparaît sous les bravos…
C’était son dernier tour de piste.
Chanson païenne
Un si beau jeune homme
Dans une soutane,
Un si beau jeune homme
Apprenti curé,
Avec un visage
À damner les anges,
Avec un sourire
Au pouvoir étrange
Et la faculté,
Pour mieux nous séduire,
De nous convertir
Pour l’éternité.
Un si beau jeune homme
Épris d’idéal,
De moralité,
Ce n’est pas banal ;
Déjà au-dessus
De tous ces pécheurs
Qu’il va ramener
Aux pieuses valeurs.
Un si beau jeune homme,
Le regard perdu
Par-delà les cieux
Qu’il convoite un peu ;
Consacrant sa vie
Riche de vertus
À de purs esprits…
Mon Dieu quel gâchis !
Pour parler d’amour
Sans jamais le faire,
Et laisser planer
Sur l’humanité
Le poids du péché,
Et la peur secrète
D’être un jour tenté
Par la pomme d’Ève…
Un si beau jeune homme
Dans une soutane,
Un si beau jeune homme
Apprenti curé.