Longer barrières et murets,
Raser les murs et se glisser
Dans chaque ligne d’ombre,
Dans chaque recoin sombre,
Toute anfractuosité,
Pourvu que le soleil
Ne puisse y accéder ;
Quand il darde ses rayons
Trop longtemps chauffés à blanc
Sur l’asphalte ou le béton,
Les façades des maisons,
Les grands immeubles d’en face,
La plus petite surface
Exposée à l’air cuisant,
Et brûle durablement,
Rôtit la peau des passants
Qui s’exposent ou qui s’attardent
Dehors bien imprudemment.
Mieux vaut sortir au plus vite
De cet enfer surchauffé,
Se dépêcher de rentrer
Et de fermer les volets,
Sans oublier d’arroser
Les plantes déshydratées
Et de verser assez d’eau
Pour que boivent les oiseaux ;
Bien tirer tous les rideaux
Pour mieux isoler les vitres,
Humidifier l’air anhydre,
Ventiler si c’est possible,
Éviter que ne s’infiltre
Cette écrasante chaleur
Qui gagne aussi l’intérieur.
Se doucher et boire de l’eau,
Pour être moins vulnérable.
Économiser ses gestes
Pour tenter de préserver
Cet air encore respirable,
Mettre son corps au repos,
Ô délices de la sieste,
Transmettre à ceux qui protestent
Les devoirs qui nous incombent ;
Se terrer dans la pénombre
En pensant qu’un jour viendra
Où l’été nous manquera.
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Orage d’été
Il y eu de grosses gouttes
Dans une averse apaisante,
D’abord éparses et chaudes,
Lourdes d’une eau bienfaisante,
Puis plus fraîches sur la peau
Ensuite vint en rideaux
La pluie fine, transparente,
Recouvrant de son manteau
La nature environnante
Et s’écoulant en ruisseaux
Mais à la fin de l’ondée,
Le vent soudain s’est levé
Pour se changer en tempête ;
Bourrasques échevelées
Qui violemment secouaient
Tout ce qui pouvait bien l’être
Alors arriva la grêle
Aux billes de marbre blanc ;
Ses grêlons réfrigérants
S’abattirent sur la ville,
Ricochant sur les corniches,
Fouettant les plantes, les vitres,
Comme au dernier jugement…
Quand tout se fut apaisé,
Le ciel retrouva sur l’heure
Son relief et ses couleurs,
Comme si de rien n’était
Et, balayant les nuages
Aux cotonneuses livrées
Qui s’étaient accumulés
Dans ces vastes pâturages,
Le vent libéra l’été.
Manège
Il fait encore un peu frais
Ça sent bon comme en été,
J’ai longuement observé
Le manège des oiseaux ;
Les courses des martinets,
L’élégante pie bavarde,
La perruche au vert plumage,
Les pigeons qui paradaient.
J’ai écouté l’étourneau,
Celui qui faisait le guet
Sur l’antenne de télé
Et sifflait sans s’arrêter ;
Je l’ai vu qui surveillait
Son nid, caché sous les tuiles,
Au-dessous de la gouttière,
Bien avant de s’y glisser
Une fois que le danger
Lui paraissait écarté.
J’ai suivi, intéressée,
Ses allers-retours au nid,
Quand il prenait avec lui
De quoi nourrir et calmer
Ses oisillons affamés,
Jusqu’aux prochaines becquées ;
Et assise à ma fenêtre
J’ai vu la première guêpe,
La première coccinelle,
Le tout premier papillon
Voleter près du balcon.
Avril au jardin
Le merle et la merlette
Sautillent de-ci de-là,
Une pie mal lunée
Chasse sans hésiter
Deux beaux pigeons ramiers.
Dans le grand catalpa,
Les gousses desséchées
Tintent discrètement
Et tombent lentement
Sur le sol, à nos pieds.
L’air chaud et parfumé
De l’exquise senteur
Des douces giroflées
Me sort de ma torpeur.
Le vent dans le jardin
Fait bruisser le feuillage,
Chatoyant et léger,
Du bouleau argenté,
Quant au cerisier fleur,
Ses bouquets composés
De petits pompons roses
Offrent, au ciel printanier,
Une pluie de pétales
Parsemant le terrain
D’un tapis doux et gai.
La terrasse est baignée
Des effluves sucrées
Provenant des buissons,
Vigoureux et rustiques,
D’orangers du Mexique
Et, longeant la maison,
Dans la petite allée
Fleurissent les rosiers.
Sous les arceaux forgés
D’un sobre métal vert,
La glycine a poussé.
Ses tiges lignifiées
Sont tout enchevêtrées,
Sculpture originale
Qui grimpe, luxuriante,
En tonnelle apaisante.
Précédant le feuillage,
Ses belles grappes tendres,
Épanouies, descendent
En dégradé de mauve
Subtil et délicat,
Répandant leur parfum
Suave et enivrant
Dans le petit matin.
Invitée en ce lieu
Par ma belle-famille,
C’est près de leur jardin
Que j’ai pu commencer
Cette convalescence,
Qui m’a ouvert les yeux
Et m’a donné la chance
De remettre du sens
Dans le cours de ma vie.
Inspirée et confiante,
J’ai pu réorienter
Un peu mon existence
Vers plus de transparence,
Donnant de l’importance
À ce qui me nourrit ;
L’art et la poésie.
Soisy sous Montmorency
Maussade est le printemps
Maussade est le printemps,
Il pleut tout doucement
Sur la campagne et sur la ville ;
Il pleut sur le toit des maisons,
Il pleut sur les fleurs du jardin,
Il pleut sur chacun des bourgeons
Qui s’ouvrent sur l’arbre voisin,
Et moi je reste bien tranquille.