Un matin de janvier

Si tu viens avec moi un matin de janvier
Si tu te lèves tôt et que tu vas dehors ;
Tu verras le ballet des nuages pressés,
Sur les murs des immeubles, parfois, des reflets d’or,
Les voilages obscurs qui cachent le soleil,
Les trouées de lumière qui déchirent le ciel
Luttant pour que le jour l’emporte sur la nuit.

Tu verras que le rose peut se mêler au gris
Derrière les arbres nus du stade déserté,
Et la métamorphose de la nature aussi,
Troublée par l’embellie de ce temps décalé ;
Les plantes endormies et celles qui s’éveillent
Trompées par un regain de douceur, et la pluie…
Un printemps qui pourtant n’est pas d’actualité
Mais qui me convient bien quand je pars travailler,
Qui apaise mon cœur, m’inspire et m’émerveille.

Première neige

La première neige est tombée         
Sous le soleil des lampadaires ;
Pas les quelques petits flocons
Qui voltigeaient le midi même
Mais de gros morceaux de coton,
Comme si le vaste édredon
Des cieux perdait son garnissage
Et se défaisait le tissage
Enveloppant les oreillers
Et les couettes du monde entier,

De la plume jusqu’au duvet,
De la plumette à barbes libres
À la plumule si gracile
De l’eider, du canard, de l’oie
Fondant sur le bout de nos doigts,
En avalanche toute blanche
Hypnotisante et apaisante.

Ils étaient de toutes les tailles,
De toutes les formes possibles ;
Une myriade de cristaux
Assemblés dans la large gamme
Qui va du petit au plus gros,
Dans une tempête très calme
Aux longues envolées gracieuses,
Digne, paisible et silencieuse.

Éclairant son tendre minois,
Le nez collé à la fenêtre
Clémence a exprimé sa joie,
Heureuse d’être de la fête
Et d’admirer le doux ballet
Si féerique de la neige.

Elle a crié son impatience
D’aller dehors en profiter
Comme au temps de sa prime enfance ;
Les larmes coulaient sur sa joue
D’un bonheur qui n’était pas feint.
La neige était au rendez-vous,
C’était plus important que tout !
Elle a tenu jusqu’au matin.

Esprits d’Halloween

La nappe de brouillard,
Dans la nuit descendue,
A recouvert la ville
De son voile ténu.

Les ampoules alignées
Le long de la ruelle,
Diffusent leur lumière
De guirlande électrique
Des plus énigmatiques,
Dans le halo jaunâtre
Venu des lampadaires.

Dans la brume automnale
Mêlée au marécage
De ces teintes grisâtres,
Danse une ribambelle
D’esprits fantomatiques,
Malicieux et rebelles,
Fins prêts pour Halloween.

Il pleut

Il pleut tout doucement
Sur la ville endormie.
Il pleut, tout simplement,
Sans ruisseau qui serpente,
Sans flaque et sans un bruit,

Ni clapotis qui chante,
Ni lumière qui brille,
L’horizon reste gris.

Les feuillages retiennent
Les gouttes, en rangs serrés,
Les trottoirs sont mouillés…

C’est un mardi d’automne
Comme il y en a tant,
Mais celui-là sans doute
Est un peu différent ;

Chaque petite goutte
Pose sa fraîche bouche
Sur ma joue, tendrement.

Mars

Déluge de pluie drue
Vent violent en rafales,
Envolées de flocons
Tourbillons dans les nues

Cliquetis des grêlons,
Giboulées qui s’installent,
Alternance d’averses
Crépitant aux fenêtres
Dans un joyeux chahut ;

Chatoiement du soleil
Le temps d’une éclaircie,
Et la terre en sommeil
Tout doucement s’éveille
Et renaît à la vie.

Paisiblement les graines
Germent sous les châssis,
Dans les jardins, les serres
Et dans tout le pays,

Lançant vers la lumière
Leurs pousses rebondies
Par l’abondante sève
Et la belle énergie
Que le printemps soulève.

Crocus et primevères,
Mimosas et jonquilles,
Délicates violettes
Ou tendres muscaris

Genêts éblouissants
Dressant leurs verges d’or
Dans le jour finissant ;
Magnolias qui arborent
Leurs boutons florissants

Aubépines, pommiers,
Pruniers et cerisiers
Aux branches habillées
En blanches mariées,

Mars ne chôme pas
Et s’en donne à cœur joie
Car, petit à petit,
Vient le vert des feuillages

Avant que les pétales
Ne leurs cèdent la place,
Tombant en confettis,
Tapissant les allées,
Les jardins, les terrasses
De leur beauté fugace.