Que faites-vous sur la Terre

— « Que faites-vous sur la Terre ?
—     Je me nourris de lumière
        Je m’hydrate à l’eau de pluie,
        Je me réchauffe au soleil,
        M’habille de brume claire
        Et m’éclaire à ce qui brille ! »
 
        Voilà, si j’ai bien compris,
        La réponse magistrale
        Qu’un artiste véritable
        Pourrait faire en plaidoirie…
 
        Que demander à la vie
        D’autre que pouvoir donner
        Libre cours à ses pensées,
        Son art et sa poésie
 
        Pour trouver cette harmonie
        De la profondeur de l’être
        Et des œuvres que l’on crée,
        Sans cesse renouvelées ?
 
        On est déjà bien loti
        D’être entouré de beauté !
        N’est-ce pas le but ultime
        D’un artiste en ce pays ?
 
        C’est tellement romantique
        De connaître la bohème,
        Et le commerce est vulgaire
        S’il n’est pas un peu éthique.
 
        Sourions donc à la vie,
        Nourrissons-nous de lumière,
        Hydratons-nous d’eau de pluie,
        Drapons-nous de brume claire
 
        Réchauffons-nous au soleil,
        Utilisons ce qui brille
        Pour éclairer nos lanternes,
        Puisque l’on est purs esprits !

Elle danse sa vie

– À Matilde –



Entre Rome et Paris,
Utilisant son corps
Afin de donner vie
Aux nouvelles envies
Germant dans son esprit,
Elle danse sa vie.
 
De recherche en recherche,
De trouvaille en trouvaille,
Écrivant sans répit
Chaque petit détail
De sa chorégraphie,
Elle danse sa vie.
 
Les images nouvelles
Issues des belles lettres
Découvertes sans cesse
Se traduisent en gestes,
Et son cœur en osmose
Un instant prend la pause,
S’envole, tourbillonne,
S’élance avec passion
Sur son inspiration.
 
La flamme qui l’anime
Dépasse les frontières
Du lieu de ses racines,
Lui faisant explorer
De nouveaux univers
Qui toujours la fascinent
Et la danse transcende
Tout ce qu’elle élabore.
 
Par petits mouvements
Qui plantent le décor,
Imaginant déjà
Ce que cela rendra
Après avoir tissé
La trame du ballet,
 
Peu à peu elle dispose,
Articule et compose
Chacun des éléments
De son enchaînement
Et peaufine les pas
De son rêve éveillé
Avant qu’il ne devienne
Pleine réalité.

Au jardin des fragrances

– À Thierry Labeyrie-Cabanne –


Au jardin des fragrances, il a identifié
Les subtiles nuances de toutes les essences
Provenant des bouquets de roses parfumées,
Qu’il venait respirer quand le temps s’y prêtait.
 
Au jardin des fragrances, pris en flagrant délice
D’humer dans leur calice d’évanescents parfums,
Il a cueilli les notes de ce feu d’artifice
En écrivant les gammes des rosiers du jardin,
 
Relevant avec soin dans ses carnets secrets
Chaque petit détail finement décelé,
Invisible présence sensuelle et troublante
Qui enchante l’esprit en embaumant le nez.
 
Il écrira plus tard sa propre partition
Jouant sur les accords de ces notes florales,
Composant sans relâche, suivant l’inspiration,
Plongé dans l’alchimie des senteurs végétales ;
 
Subtiles harmonies et mélodies suaves,
Olfactive musique de ce chant délectable,
Concentré sur l’ultime tâche qu’il s’est donnée ;
Créer la symphonie qu’il a imaginée.

Parc de l’Orangerie

– À Thierry L.-C. –


Par un bel après-midi,
Parc de l’Orangerie,
Près des roses j’ai croisé
Un amateur de beauté ;
Collectionneur des parfums
Qui embaument nos jardins.
 
Ainsi plongés dans les cœurs
De ces belles raffinées
Aux capiteuses senteurs,
Nous finîmes peu à peu
Par nous trouver nez à nez
Au-dessus de ces rosiers.
 
Lors de pétale en pétale
Et d’effluves en effluves,
Roses musquées, roses thé,
Unies, poudrées, panachées,
 
La langue enfin déliée
Par la troublante fragrance
Déposée sur le papier
D’une rose stylisée,
 
Nous avons pu échanger
Sur nos centres d’intérêt
Et, de métier en métier,
Sur la passion de créer…

Portrait d’une Pie

Familières et contrastées,
Notes de plumes sur un clavier
Qui se déploie dans l’azuré
D’un ciel aussi bleu que l’été,
 
Dans une élégante envolée,
Elle est passée si près de moi
La belle au plumage de jais,
Gantée de ses blanches rémiges,
 
Que je ne pouvais me priver
D’écrire sous son beau portrait
Ces vers qui scellent son prestige.
 
 
 

D’après le tableau de Hovhannès Haroutiounian
La Pie, huile sur isorel, 35 x 50 cm, 2020