Pour les yeux d’un enfant

– À O. L. et J. –
– Aux victimes de l’attentat du marché de Noël de Magdebourg…

  Que leur âme repose en paix. –


Pour les yeux d’un enfant, par tout émerveillé,

Attendant, impatient, de pouvoir admirer

Le fabuleux traîneau s’élançant dans le ciel

Et survolant d’un trait le marché de Noël,

Juste avant le départ pour la grande tournée

D’un grand-père imposant à barbe nivéenne,

Dans sa pelisse rouge à la fourrure blanche,

Conduisant l’attelage endurant de ses rennes

Débordant de jolis paquets en avalanche,

Pour les distribuer aux enfants endormis

Puis au petit matin, étonné et ravi,

Le regard étoilé et le sourire aux lèvres,

Un peu intimidé par cette découverte

Des cadeaux rassemblés au pied du beau sapin,

Dans chacun des souliers disposés avec soin

Un bambin, tout heureux de pouvoir explorer

Les douces tentations s’offrant à ses prunelles,

Pour goûter dans la joie la magie de Noël

Et jouer sous les yeux attendris des plus grands

La partition d’un rêve pour une âme d’enfant

Un enfant à soi

– À C. –

Des enfants chantant à tue-tête

D’autres jouant ici et là ;

Tout est espoir pour ceux qui peinent

À recevoir la vie en soi

Un enfant où l’on se projette,

Pour qui l’on chantonne à mi-voix,

À qui tendrement l’on s’adresse ;

Un bébé que l’on couve en soi

Des enfants criants, espiègles,

Courant essoufflés à deux pas ;

Tout est douleur pour ceux qui perdent

Ce fruit qui grandissait en soi

Des enfants qui rient aux éclats

Et tout en chahutant t’escortent ;

Tout est souffrance à ceux qui portent

Ce vide immense au fond de soi

Un enfant venant sur la Terre

Et s’incarnant pour quelques mois,

Guidant l’amour de l’univers ;

L’éternité lui tend les bras

Tu n’as pas pu voir le soleil

– Aux bébés partis trop vite –

Tu n’as pas pu voir le soleil

Ni les brumes tombées du ciel,

Petit être prêt à quitter

Le ventre accueillant de ta mère

Tu n’as pas pu voir les étoiles

Qui scintillent au firmament,

Les arcs-en-ciel après l’orage,

Les yeux aimants de tes parents

Tu n’as pas pu voir la lumière,

La nuit est tombée juste avant,

Ton existence fut si brève

Qu’elle a laissé nos cœurs béants

Mais tu fais partie des nuages,

Des brumes et du firmament,

Des arcs-en-ciel après l’orage

Du cœur aimant de tes parents

Tu referas ce grand voyage

Rosée brillante du levant

Pour danser parmi les étoiles,

Poussière d’or dans le couchant

Un enfant rit

– À O. –

Chute limpide, flots qui pétillent,

Dans les remous un enfant rit

Du plaisir de l’eau qui bondit,

Tourbillonne, s’échappe et vit.

Il a du soleil dans la voix,

Et tant d’étoiles dans les yeux ;

Quand il laisse éclater sa joie,

C’est une cascade de rires,

Débordante et irrésistible,

Qui jaillit partout à la fois,

Irradiant son corps d’enfant

Et par vagues l’éclaboussant

De mille perles de diamant

Scintillant tout autour de lui ;

Offrande communicative,

Exubérante et volubile,

D’un présent radieux, fragile,

D’où naît un bonheur inspirant.