Le vent, enfin !

Le vent, enfin !
À défaut d’air du large
D’eau salée et d’embruns,

Une mer de nuages,
Grise à perte de vue,
A remplacé le bleu
Céleste, somptueux,
Qui habillait les nues.

Le zéphyr nous invite
À quitter nos demeures
Pour respirer sans fin
Cette fraîcheur exquise,

Et nous offre une pause,
Largement méritée,
Après ces jours passés
À cuire à l’étouffée
Dans le four de l’été.

Sortir à l’extérieur
Et sentir cette brise,
Caresse de satin
Dans le petit matin,
Nous met du baume au cœur,

Et nous donne l’envie
De nous reprendre en main
En réveillant nos vies
Qui s’étaient endormies,
Engourdies de torpeur,
Dans la lourde moiteur
De ces après-midi.

Canicule

Longer barrières et murets,
Raser les murs et se glisser
Dans chaque ligne d’ombre,
Dans chaque recoin sombre,
Toute anfractuosité,
Pourvu que le soleil
Ne puisse y accéder ;
 
Quand il darde ses rayons
Trop longtemps chauffés à blanc
Sur l’asphalte ou le béton,
Les façades des maisons,
Les grands immeubles d’en face,
La plus petite surface
Exposée à l’air cuisant,
 
Et brûle durablement,
Rôtit la peau des passants
Qui s’exposent ou qui s’attardent
Dehors bien imprudemment.
 
Mieux vaut sortir au plus vite
De cet enfer surchauffé,
Se dépêcher de rentrer
Et de fermer les volets,
Sans oublier d’arroser
Les plantes déshydratées
Et de verser assez d’eau
Pour que boivent les oiseaux ;
 
Bien tirer tous les rideaux
Pour mieux isoler les vitres,
Humidifier l’air anhydre,
Ventiler si c’est possible,
Éviter que ne s’infiltre
Cette écrasante chaleur
Qui gagne aussi l’intérieur.
 
Se doucher et boire de l’eau,
Pour être moins vulnérable.
Économiser ses gestes
Pour tenter de préserver
Cet air encore respirable,
 
Mettre son corps au repos,
Ô délices de la sieste,
Transmettre à ceux qui protestent
Les devoirs qui nous incombent ;
Se terrer dans la pénombre
En pensant qu’un jour viendra
Où l’été nous manquera.

Orage d’été

Il y eu de grosses gouttes

Dans une averse apaisante,

D’abord éparses et chaudes,

Lourdes d’une eau bienfaisante,

Puis plus fraîches sur la peau

Ensuite vint en rideaux

La pluie fine, transparente,

Recouvrant de son manteau

La nature environnante

Et s’écoulant en ruisseaux

Mais à la fin de l’ondée,

Le vent soudain s’est levé

Pour se changer en tempête ;

Bourrasques échevelées

Qui violemment secouaient

Tout ce qui pouvait bien l’être

Alors arriva la grêle

Aux billes de marbre blanc ;

Ses grêlons réfrigérants

S’abattirent sur la ville,

Ricochant sur les corniches,

Fouettant les plantes, les vitres,

Comme au dernier jugement…

Quand tout se fut apaisé,

Le ciel retrouva sur l’heure

Son relief et ses couleurs,

Comme si de rien n’était

Et, balayant les nuages

Aux cotonneuses livrées

Qui s’étaient accumulés

Dans ces vastes pâturages,

Le vent libéra l’été.

Bénédiction

D’étouffantes minutes
Sans un frisson d’air pur
Dans le bleu implacable 
De l’azur ;
La nature immobile,
Figée par l’air brûlant,
Attend l’événement…

Une onde de fraîcheur
Transperce la moiteur,
Balayant la poussière,
Et l’on respire enfin !
De savoureux parfums
Exhalés de la terre
Imprègnent l’atmosphère
Du matin.

Dans un vacarme intense
L’eau s’écoule en cadence
Et ce rideau si dense
Est bu par les chemins ;
Un brouillard incertain
Flotte dans le ciel clair
Et le soleil espère
Reprendre du terrain.

Les gouttes réverbèrent
Mille éclats de lumière
Et mes yeux s’émerveillent
De la beauté qui vient ;    
Mon corps vivifié par la pluie
Renaît aux chaleureux rayons
Et je voudrais toute ma vie
Vibrer à la bénédiction
De chaque détail enchanteur
Qu’on ne sait plus nommer Bonheur.