– À Missak Manouchian, à sa femme Mélinée et à tous les résistants
qui ensemble ont œuvré pour l’honneur de la France –
Sur le mont Valérien il n’y a plus de givre
Quatre-vingts ans séparent hier et aujourd’hui
Mais vos cœurs amoureux battent à l’infini ;
Vous auriez tant aimé goûter la joie de vivre
Le plus longtemps possible s’il vous l’était permis,
Vous qui avez chéri le soleil et la vie.
Les regarder en face est un état d’esprit
Pour lequel vous avez payé un lourd tribut.
Quand tomba la sentence de peine capitale
S’est figé votre sang dans un noir sidéral ;
L’adieu à l’existence s’est fait le jour venu.
Partisans, camarades, étiez jugés coupables
D’avoir su résister au milieu de la nuit ;
Quand les mots des poèmes butent sur tant de drames
Les poètes parfois doivent prendre les armes
Et pour la Liberté tout risquer sans déni.
Missak et Mélinée, l’ombre bleue d’Ararat
Par-delà le tombeau garde vos fières âmes ;
Nous sommes les enfants nés de votre courage
Et les petits-enfants dont l’exemple transmis
Accompagne les jours et inspire les vies.
Quatre-vingts ans après, mais qu’est-ce que le temps,
Quand on a comme vous toute l’éternité
Pour éveiller un monde qui n’a plus d’alibi,
Mais reste encore aveugle et sourd aux artifices
Que les tyrans emploient pour nous rendre complices
De leur ignominie et de leur lâcheté ?
Sur le mont Valérien qui n’est plus blanc de givre
Vos actions héroïques résonneront longtemps
Mais pour l’heur il est temps de célébrer l’instant.
Saluons cet hommage que la nation vous rend :
La justice est venue sous vos pas triomphants*.
* Référence à un vers extrait de « Strophes pour se souvenir », poème de
Louis Aragon écrit en 1955 en hommage aux vingt-trois résistants FTP-MOI (Francs-tireurs et partisans – Main-d’œuvre immigrée) du groupe Manouchian