– À Monsieur Jivan Avetisyan –
Saccager, encore et toujours, détruire ce qui nous entoure,
Tout ce qui n’a pas lieu d’être s’il ne provient pas de nous,
Tout ce qui nous dépasse, ce qui laisse une trace,
Et nous renvoie soudain à la sourde menace
De notre indignité au grand jour révélée.
Poursuivre avec méthode le projet planifié,
Objectif avoué aux moyens assumés
D’un monde à notre image, faisant fi du passé.
Ne laisser que des ruines où hier s’élevait
La noble architecture célébrant le sacré,
L’inspirante splendeur d’entrelacs ciselés
Sur les pierres sculptées d’antiques cimetières,
Champs de khatchkars dressés vers la gloire céleste ;
Symboles authentiques, toujours revisités,
Qui fondent un pays profondément ancré.
Broyant l’un après l’autre chaque éloquent vestige,
Ne garder nulle pierre qui puisse témoigner
D’un patrimoine riche au glorieux prestige,
Façonné par l’histoire à travers les années.
Puis, le crime accompli, dans l’espace vidé
De son souffle vital, comme si de rien n’était,
Redistribuant les cartes de ce jeu aux dés pipés
Dans l’hypocrite échiquier d’un monde âpre qui perd pied,
Niant l’amour du prochain, privé du moindre respect
Envers le génie humain et sa grandeur révélée,
Venir et se proclamer légitime possesseur
D’un territoire occupé par de vils conspirateurs
Dont les terres nous reviennent, sans contestation possible,
Les preuves qui existaient, chaque fois prises pour cible,
Ayant été pilonnées sans que quiconque intervienne.